Homélie - 1er dimanche du Carême A 2020

Homélie
2020/03/03
Homélie - 1er dimanche du Carême A 2020

1er dimanche du Carême (Année A 2020)

"Convertissez-vous et coryez à l'Évangile"

Homélie
(Gn 2,7-9 ; 3,1-7a ; Ps 50 ; Rm 5,12-19 ; Mt 4,1-11)

Les récits évangéliques que la liturgie va nous faire lire durant ce Carême sont ceux que, depuis des siècles, l’Église propose aux catéchumènes, à ceux et celles qui se préparent à recevoir le baptême. Le Carême a toujours été un temps particulier pour se préparer au baptême. Dans de nombreuses communautés chrétiennes, partout dans le monde, la fête de Pâques va être l’occasion de baptêmes, et particulièrement d’adultes. En écrivant cela m’est revenu à la mémoire qu’il y a quelques années, je me suis retrouvé à Paris le dimanche qui suit Pâques et je suis allé concélébrer à la cathédrale Notre-Dame. À cette Eucharistie avaient été convoqués tous les baptisés de Pâques des paroisses du diocèse de Paris. Ils étaient plus de 500, tous revêtus du vêtement blanc de leur baptême et accompagnés par leurs parrains et marraines. La célébration très solennelle a débuté à l’extérieur sur le parvis de la cathédrale.

Cette Eucharistie de ce matin, ici dans la cathédrale Notre-Dame de Québec, nous fait entrer dans la démarche spirituelle du Carême. C’est donc dire que l’Église nous invite à profiter de ces quarante jours pour renouveler, raffermir les engagements de notre baptême, et aussi ces autres engagements que nous avons pris au cours des années. Nous nous préparerons ainsi à cette profession de foi que nous ferons lors de la Veillée pascale du Samedi Saint ou du Dimanche de Pâques. Nous redirons alors au Seigneur et à la communauté de ses disciples notre désir de rester fidèles à nos engagements chrétiens. Que ce Carême nous rappelle cette parole de Jésus à ses disciples entendue il y a trois dimanches : Vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde, pour cela, convertissez-vous et croyez à l’Évangile.

La première lecture était extraite du livre de la Genèse. Elle nous ramenait donc au tout début de la Bible, de l’histoire du salut. Adam et Ève nous sont ainsi rappelés en ce début du Carême parce qu’ils symbolisent l’humanité fortement tentée de ne plus accepter de dépendre de Dieu, voulant ne dépendre que d’elle-même. Une tentation très actuelle ! Ce passage de l’Ancien Testament a été choisi en lien avec le récit de saint Matthieu qui, dans son Évangile, nous présente Jésus, comme étant cet homme qui, au contraire, choisit, décide de vivre sa vie en dépendance totale de Dieu son Père. Sa fidélité à la mission reçue de Dieu sera au cœur de la vie de cet homme de Galilée, mission qui va le mettre au service de son peuple jusqu’au don de sa vie. Les Évangiles de Matthieu, Marc et Luc font tous les trois un lien entre les tentations de Jésus au désert et son baptême par Jean Baptiste. Jésus venait donc d’entendre une voix disant à son sujet : Celui-ci est mon Fils bien-aimé. Le récit se continue par ces mots : Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le diable qui s’adresse à lui en disant : Si tu es le Fils de Dieu….  

Les tentations de Jésus ! Dans notre langage habituel, le mot tentation signifie être porté à faire des choses mauvaises, interdites, ou encore des choses banales, sans importance. Dans les Évangiles la tentation est quelque chose de beaucoup plus sérieux. Il faut voir que derrière les trois tentations du diable on retrouve trois fois les mêmes mots : Si tu es le Fils de Dieu… Cela veut dire que Satan essaie de détourner Jésus de sa vocation de Fils obéissant à Dieu son Père. Chaque fois, Jésus résiste à la tentation qui voudrait le séparer du Père en réaffirmant sa relation filiale avec Lui. Il répond toujours de la même façon : Car il est écrit : L’homme vit d’abord de ce qui sort de la bouche de Dieu ! … Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu! … Tu ne te prosterneras que devant le Seigneur ton Dieu ! Ce qui est premier dans la vie de Jésus, c’est sa relation avec Dieu, son Père. Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.

Comme pour Jésus, la tentation importante que vit chaque baptisé, ce n’est pas la gourmandise ou l’orgueil ou la domination des autres. La tentation la plus grave pour un baptisé porte précisément sur sa relation filiale avec Dieu. Le tentateur a toujours attaqué les baptisés, et peut-être davantage aujourd’hui, sur leur identité de croyants, de croyantes, de disciples de Jésus. Il essaie et il réussit trop souvent à les persuader qu’ils doivent s’appuyer sur leurs propres façons de penser, de vivre et aussi sur ce que pensent la majorité des gens.

Les tentations de Jésus étaient des appels à se conformer à la mentalité de son temps. Tellement de gens et même ses disciples auraient bien voulu qu’il soit un messie temporel, terrestre, politique, qui s’engagerait à libérer son peuple de l’oppresseur romain. Il en est de même pour beaucoup de chrétiens et chrétiennes d’aujourd’hui, fortement tentés d’imiter la mentalité courante, les idées qui circulent, de se conformer à ce que disent les médias et les sondages. On voit bien que les baptisés sont sans cesse placés face à cette tentation contre la foi. Se dire athée aujourd’hui ne cause aucun problème, ça se dit sans aucune gêne. Nombreux sont ceux qui trouvent qu’on vit très bien sans Dieu. Ou, si on dit croire en Dieu, on ne veut surtout pas qu’il dérange et alors on rejette toute religion, ne voyant là rien d’intéressant.   

Lors de la célébration eucharistique de la Veillée pascale ou du Dimanche de Pâques, avant d’affirmer par trois fois : Nous croyons en Dieu, la liturgie va nous inviter à dire aussi trois fois : Je renonce à Satan. Nous le ferons humblement, à l’exemple de Jésus dans le désert, qui par trois fois a remporté cette victoire sur le diable, une décision à laquelle il sera fidèle jusqu’au don de sa vie et qui lui vaudra la gloire de la résurrection.

Dans son message pour ce temps du Carême, le pape François écrit ceci : J’invoque l’intercession de la Très Sainte Vierge Marie pour ce Carême, afin que nous accueillions l’appel à nous laisser réconcilier avec Dieu, pour fixer le regard du cœur sur le Mystère pascal et nous convertir à un dialogue ouvert et sincère avec Dieu. C’est ainsi que nous pourrons devenir ce que le Christ dit de ses disciples, qu’ils sont le sel de la terre et la lumière du monde.

Marc Bouchard, prêtre

Mbouchard751@gmail.com