Homélie - 3e dimanche du Carême B 2021

Homélie
2021/03/02
Homélie - 3e dimanche du Carême B 2021

3e dimanche du Carême B 2021

Suivre le Christ, un appel à la prière

Homélie
(Ex 20,1-17 ; I Cor 1,22-25 ; Jn 2,13-25)

Un récit un peu étonnant, l’Évangile de ce 3e dimanche ! Dans tous les films sur la vie de Jésus de Nazareth, cette scène est inévitablement mise en évidence, et avec raison. Elle nous fait voir Jésus en colère, pas content du tout de voir ce qui se passe dans la Maison de Dieu. Il fit un fouet avec des cordes, chassa les marchands et les changeurs, jeta l'argent par terre, renversa les comptoirs. Pourquoi cette colère de Jésus ? La raison en est bien simple : les gens n'utilisaient pas le Temple pour ce qu'il devait être, pour ce que Dieu voulait qu'il soit, un Lieu saint, une Maison de prière. Les Évangiles nous racontent que Jésus, résolument fidèle à la volonté de Dieu, son Père, en contact constant avec lui, a connu de nombreuses situations qu’il ne pouvait pas tolérer, comme celle dont il nous est parlé aujourd’hui, plus éclatante que bien d’autres. 

Ce texte de l’Évangile selon saint Jean, on le retrouve aussi dans les trois autres évangiles. Il s’agit d’un événement de la vie de Jésus que l’Église du premier siècle tenait sûrement à conserver dans sa mémoire. Ce geste de Jésus ne pouvait pas, ne devait pas être oublié. Plus tard, quand on établira la démarche du Carême, un temps de renouveau dans la prière, on tiendra à en faire la lecture. En l’écoutant ou en le lisant, en ce temps d’appel à la conversion, ne nous sentons-nous pas invités à nous laisser déranger par ce geste impressionnant de Jésus. Le Carême ne se veut-il pas un temps pour réfléchir sur notre fidélité à la prière, sur la vérité, la qualité de notre prière ! Quand et comment prions-nous ? Quelles sont nos vraies motivations, nos intentions, les plus intérieures, ce qui nous motive dans notre recherche, dans notre vie spirituelle ? Quelle place faisons-nous à la prière et donc à la présence de Dieu dans notre vie ?

Suivre Jésus ! Nous disons qu’il est notre Maître, notre Seigneur ! Les évangiles nous disent et redisent que Jésus priait souvent, et même le soir lorsque parce que sa journée avait été tellement occupée, parfois aussi quand il vivait quelque chose de difficile, d’exigeant, mais toujours pour dire son attachement à Dieu son Père, son désir d’accomplir sa volonté. L’Évangile de saint Marc, le premier, le plus ancien des quatre évangiles commence par ces mots : Commencement de l’Évangile de Jésus, Christ, Fils de Dieu et le premier geste de sa vie publique ce sera d’inviter ses premiers disciples, Pierre, André, Jacques et Jean, à le suivre et il les amènera avec lui à la synagogue de Capharnaüm pour la prière du sabbat. Conscients de cela, ils en seront dérangés et, un jour, ils lui diront : Maître, apprends-nous à prier. Il en est de même dans l’Évangile de saint Jean où ce récit vient au début de la vie publique de Jésus, après celui de l’appel des mêmes quatre disciples, des noces de Cana où Jésus répondra à la prière de sa Mère. Tous ceux et celles qui accepteront de faire comme eux découvriront la place importante, essentielle que la prière occupait dans la vie de leur Maître.

Le temps du Carême, un temps de purification et de renouvellement ! Ce récit, que nous lisons aujourd’hui ne nous invite-t-il pas à prendre conscience que nos coeurs ont toujours besoin d'être purifiés. Il nous faut nous aussi nous défaire de toutes nos préoccupations mesquines, de nos égoïsmes, de la recherche de notre satisfaction, de nos intérêts personnels. Laissons-nous bousculer un peu par cette colère de Jésus en nous disant qu'elle nous concerne nous aussi. Jésus veut nous faire saisir le sens caché, le sens vrai, de notre vie de baptisés, de disciples, peut-être plus spécialement de la prière liturgique, de l’Eucharistie, qui commence par nous confier à la miséricorde de Dieu notre Père, dont les oraisons se terminent souvent en disant : Par Jésus le Christ notre Seigneur, à qui nous confions notre prière afin qu’il la présente à son Père et notre Père.

Peut-être est-il bon pour bien comprendre ce geste violent de Jésus chassant les vendeurs du Temple, de nous souvenir de ce que représentait le Temple de Jérusalem, de ce qu'il était dans le projet de Dieu et donc pour les Juifs fidèles à la Loi, rappelée dans la première lecture. Pour les Juifs, il s’agissait de la Maison de Dieu, celle où il convoquait son peuple. C'était l'endroit sacré par excellence, le Saint des Saints, ce lieu où se trouvait, symboliquement manifestée, la présence de Dieu au milieu de son peuple. Nous comprenons alors pourquoi, encore aujourd'hui, les Juifs sont si attachés à ce lieu sacré qu’est le Mur des Lamentations, ce qui reste du Temple après sa destruction en l'an 70. Ces pierres vénérables sont pour tous les Juifs du monde le vrai lieu de pèlerinage, le lieu où la prière juive traditionnelle ne cesse jamais parce que là, pour eux, est rappelée la Présence de Dieu dans le monde.

On comprend la réaction des Juifs en voyant agir Jésus : Quel signe peux-tu nous donner pour agir ainsi ? Ceux qui étaient là, même ses disciples, n’ont rien compris de sa réponse. Pour nous, chrétiens, la réponse de Jésus est très claire : Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. L’Évangéliste ajoute ces mots : Mais lui parlait du sanctuaire de son corps. Jésus n’a pas dit, ce sanctuaire je le reconstruirai, mais je le relèverai. Relever, c’est le verbe que les écrivains sacrés emploient pour parler de la résurrection, se relever d’entre les morts. Disciples de Jésus, il nous fait saisir ce que Jésus affirme dans ce texte évangélique d'aujourd'hui. Le lieu de la présence de Dieu sur cette terre, ce ne sera plus un édifice, ce sera son Corps.

Telle est la raison fondamentale de l'importance de l'Eucharistie dans notre vie. Voici que je serai avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde, a promis Jésus. L'Eucharistie est la manifestation par excellence de la réalisation de cette promesse. Elle est vraiment le lieu où, en Jésus, Dieu vient habiter parmi nous. Il est sûr que Dieu est partout, c'est une des premières réalités de la foi qu’on nous a enseignées. Mais, reconnaissons-le, nous avons besoin d'un lieu où la présence de Dieu peut se révéler dans toute sa vérité. Dieu a voulu que le lieu par excellence de la rencontre avec lui, ce soit en Jésus. Le vrai Temple de Dieu au milieu du monde, c'est le Corps du Christ, la Communauté de ses disciples accueillant sa Parole, partageant son Pain de vie. Cette grâce exceptionnelle nous est accordée chaque fois que nous célébrons l’Eucharistie car alors le geste de la communion fait de notre propre corps la maison où le Ressuscité vient habiter, une Maison de prière.

Vous êtes corps du Christ, nous dit saint Paul, chacun pour votre part, vous êtes membres de ce corps. … Dieu a fait du Christ la tête de l’Église qui est son corps. … Les Actes des Apôtres nus disent que Les premiers chrétiens étaient assidus à l’enseignement des Apôtres, à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. …. C’est ce que veut dire Suivre le Christ!

Marc Bouchard, prêtre

Mbouchard751@gmail.com