Homélie - 3e dimanche du Carême A 2020

Homélie
2020/03/16
Homélie - 3e dimanche du Carême A 2020

3e dimanche du Carême (Année A 2020)

"Nous savons que tu es le Sauveur du monde"

Homélie
(Ex 17,3-7 ; Ps 94 ; Rm 5,1-2.5-8 ; Jn 4,5-41)

La rencontre de Jésus avec la Samaritaine, des quatre évangélistes saint Jean est le seul à nous rapporter ce dialogue, le plus long que Jésus ait eu avec une personne seule. Cet entretien peut nous parler à nous aussi et c’est pour cela qu’il faut le lire en entier. Ce dialogue de Jésus avec cette femme de Samarie peut être vu comme celui de la parabole du Bon Berger avec sa Brebis. Cette rencontre de Jésus avec la Samaritaine ne symboliserait-elle pas la rencontre de Jésus avec l’humanité, marquée profondément elle aussi par beaucoup de problèmes et par le péché ? Notre monde d’aujourd’hui n’aurait-il pas besoin de rencontrer celui qui est le Sauveur du monde ? Ce sont-ce pas là les derniers mots du récit que nous venons d’entendre.

Épuisé par une longue marche, accablé par un soleil ardent, Jésus s’est assis à l’ombre, sur la margelle d’un puits, comme le ferait n’importe qui. Il est là, seul, et a tellement soif qu’il est prêt à demander à boire à la première personne venue. Une femme s’approche, elle vient puiser de l’eau. Même s’il a beaucoup soif, normalement Jésus ne devrait pas s’adresser à elle. Le récit dit bien que les disciples étaient surpris de voir Jésus parler avec une femme. Surtout avec cette femme est une étrangère, appartenant au peuple samaritain, qui ne partageait ni la foi, ni le culte des Juifs. De plus, cette femme menait une vie pour le moins scandaleuse.

Jésus avait soif. La femme aussi avait soif et elle avait besoin d’eau pour la soif des siens à la maison, pour sa cuisine, pour son lavage. Tous les deux avaient des motifs bien ordinaires pour se retrouver en ce même endroit. Voilà, que de leur vie à tous les deux, surgit une conversation, qui aurait pu être banale, mais qui devient un dialogue qui n’a jamais cessé de faire réfléchir les disciples du Seigneur. N'est-ce pas ce que nous sommes en train de faire, vingt siècles plus tard, bien loin de la Samarie.

L’Église a bien des raisons de nous faire lire ce récit, mais elle le fait en ce temps du Carême pour évoquer plus particulièrement la symbolique de l’eau, l’eau qui joue dans la vie humaine un rôle majeur, essentiel, et qui est aussi au cœur de cet échange. La conversation commence par cette demande de Jésus : Donne-moi à boire. Quand nous lirons le récit de la création, lors de la Veillée pascale, nous verrons que, dès le deuxième verset de la Bible, l’importance de l’eau est évoquée. Au commencement du monde, le souffle de Dieu planait au-dessus des eaux. Et le premier geste du Créateur sera de séparer les eaux de la terre parce que c’est toute la création qui a besoin d’eau, qui a soif. La Bible nous dit aussi que c’est en traversant les eaux de la mer Rouge que le peuple de Dieu a été libéré de la servitude. Au temps de Noé, les eaux abondantes du déluge ont été l’occasion de faire venir une vie nouvelle. La première lecture nous rappelait comment Dieu a répondu à la demande de son peuple qui souffrait de la soif durant sa longue marche dans le désert. Les prophètes ont utilisé l’eau comme symbole pour dire le désir de Dieu de susciter une vie nouvelle vie chez les croyants : Je verserai sur vous une eau pure et vous serez purifiés, disait Ézéchiel. Si l’eau est importante dans la révélation biblique, dans l’histoire du salut, elle occupe une place majeure dans la symbolique chrétienne, servant particulièrement dans le sacrement du Baptême pour signifier l’entrée dans une vie nouvelle, la vie de fils et filles de Dieu. Cela nous est rappelé par ce geste qu’on est invité à faire quand on entre dans une église ou une chapelle, soit le signe de la croix avec de l’eau du bénitier.

La rencontre de Jésus auprès du puits où la Samaritaine était venue puiser l’eau, essentielle à sa vie et à celle de sa famille, lui fait peu à peu prendre conscience qu’il y a en elle une autre soif. Cette soif que la Samaritaine sent jaillir dans son cœur prend sa source dans la soif présente dans le cœur de Jésus. Il y a dans le cœur de Jésus cette soif d’étancher la soif spirituelle de toute personne, la soif de révéler et de transmettre la véritable vie, celle qui vient de son Père. Cette femme justement a soif d’autre chose que de l’eau du puits et voilà que quelque chose de nouveau naît au plus profond d’elle-même. Peu à peu, en écoutant Jésus, son cœur s’ouvre et l’eau vive pénètre en elle. La voilà transformée, remplie d’une vie nouvelle.

Elle veut aussitôt partager sa découverte et sa joie, faire que les gens de sa ville viennent aussi puiser à cette source d’eau vive qu’est la parole de Jésus. L’écoute, l’accueil de cette parole leur fera dire à eux aussi, tout comme notre baptême nous fait dire à nous : C’est vraiment lui le Sauveur du monde, celui que nous sommes venus rencontrer dans cette Eucharistie.

Marc Bouchard, prêtre

Mbouchard751@gmail.com